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Lanzarote, épisode 7...

lundi 18 décembre 2017, par Dominique Villy

Du noir, du rouge, du blanc, du vert, du bleu. Et puis rien d’autre, ou presque. Avant même d’atterrir sur Lanzarote, ces teintes s’imposent au regard.
Vue d’avion, Lanzarote offre une palette de couleurs harmonieuse, une myriade de taches blanches parsemant une étendue aride et vallonnée, baignée par les eaux de l’Atlantique.
Une fois quitté l’aéroport d’Arrecife, la capitale, on est gagné par une sensation de sérénité. L’affichage publicitaire étant banni, nul panneau criard ne vient troubler un paysage aux tons de cendre et de feu.
Cette interdiction, on la doit à César Manrique (1919-1992), peintre, sculpteur et architecte natif d’Arrecife, qui, amoureux de son île, s’évertua à en faire un tableau à ciel ouvert.
Avec la complicité du maire d’Arrecife (de 1960 à 1974), l’artiste organisa le paysage de manière à marier le plus harmonieusement possible nature et culture.
De cette lave noire qui envahit tout et déforme les sols, il sut tirer le meilleur parti. Son action permit à l’île espagnole de se voir déclarée, en 1993, Réserve de Biosphère par l’Unesco.
Ce dialogue respectueux de l’homme avec son environnement, César Manrique le théorisa en élaborant une idéologie esthétique nommée « art-nature/nature-art ». Pour l’habitat, César Manrique fixa ainsi des règles strictes : des maisons cubiques, de deux étages maximum, recouvertes de chaux blanche, la couleur des volets devant s’inscrire dans une palette étroite allant du vert au bleu.
« Des maisons humbles avec des volumes simples », disait-il.
Disséminés dans Lanzarote, des centres d’art, de culture et de tourisme, qu’il a conçus selon ses principes, permettent aux visiteurs de découvrir les richesses de l’île en suivant, comme sur un jeu de piste, les extraordinaires réalisations de l’artiste.
Au centre géographique de l’île, une sculpture se détache à l’horizon, qui servira de repère, tel un phare, le temps du voyage. Oeuvre de Manrique, ce « Monument à la Fécondité », a été réalisé à partir d’anciens réservoirs d’eau de voiliers et d’objets divers assemblés de manière à figurer un personnage sur une bête de somme.
Ce souci d’intégration, dans ses œuvres, d’objets détournés de leur usage premier, se manifeste dans les deux maisons où vécut l’artiste : celle située dans le village d’Haria, transformée en musée, où il vécut à la fin de sa vie, de 1988 à 1992, comme dans la première, imaginée dès 1968 à Taro de Tahiche, et dont il fit un laboratoire de tous ses projets.
Devenue une fondation, ouverte au public, cette habitation témoigne de l’esprit facétieux de cet hédoniste, qui n’aimait rien tant qu’ organiser des fêtes chez lui en compagnie de ses amis artistes.
Poteaux télégraphiques ou mâts de bateau en guise de poutres, gouvernail faisant office de porte, lucarnes percées partout afin de laisser la lumière naturelle envahir l’espace, salles de bains façon verrières ouvertes sur les champs de lave : construite avec la nature, cette maison est, à elle seule, une illustration des idéaux de Manrique.
Un escalier, menant au sous-sol, ouvre sur un univers digne d’un film de science-fiction des années 1970, avec ses salons et piscines aménagés dans des bulles de lave reliées entre elles par des couloirs où se sont croisées les célébrités de l’époque, Omar Sharif, Anthony Queen, Andy Warhol
À la même époque, Manrique conçoit, sur la commune d’Haria, au cœur du tunnel volcanique formé lors de l’éruption du volcan de la Corona et où subsiste un lac naturel, le premier des centres d’art, de culture et de tourisme, les Jameos del Agua. Pierre volcanique, eau et végétation s’intègrent à la création architecturale aux allures de cathédrale souterraine. Un restaurant et un bar permettent de profiter de la magie du lieu après avoir assisté à un concert dans l’auditorium aménagé dans une grotte volcanique.

Car Manrique a su concilier ouverture aux touristes du patrimoine volcanique de l’île et respect de cet héritage naturel.

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