Œil de DOM
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Histoire de clefs

vendredi 15 juin 2012, par Dominique Villy

On parlait de clefs égarées, tout à l’heure, à la fin du repas.
Je me suis alors souvenu d’un épisode succulent...

C’était il y a trois ou quatre ans ; Christelle et David partaient en voyage. Je les avais conduits à la gare, avec leur Toyota.

Et j’avais donc ajouté la clef de la Toyota à mon trousseau, déjà impressionnant, ceux qui l’ont vu pourront confirmer ! (270 grammes sur ma balance de cuisine)

Le soir même, je suis parti au volant de la Toyota jusqu’au supermarché le plus proche, pour emplir les entrailles du réfrigérateur avec toutes les bonnes choses qui semblent disparaître au fur et à mesure qu’on les y dépose.

Quarante minutes après, je sors de ce temple de la consommation en poussant à grand peine un chariot débordant.

J’approche de la voiture, je fouille ma poche : pas de trousseau de clefs.
Qu’importe, je l’ai sûrement glissé dans mon sac. Je tâtonne.

Rien.

J’ouvre grand le sac, je glisse la main dans chaque compartiment, un à un.

Rien.

Bon, pas de panique, un trousseau de clefs aussi volumineux, ça ne passe pas inaperçu. Quelqu’un est certainement en train de me poursuivre, l’objet à la main, pour me le rendre. Le type me hèle, même, et je ne l’ai pas entendu. Ça va se régler illico. Je lève la tête, le visage déjà fendu d’un large sourire, prêt à remercier chaleureusement le brave gars.

Personne !

Bon. Je retourne les poches de mon pantalon, sans oublier celle que ce fourbe de styliste à placé sur le bas de la jambe, à une hauteur que personne ne peut atteindre pour y enfourner qui que ce soit, à moins d’être équipé de bras de singe, mais c’est pas mon cas !

Rien.

Bon sang ! Mais c’est bien sûr : On aura retrouvé mon trousseau dans le magasin, et on l’aura porté prestement à l’hôtesse d’accueil !
C’est du moins ce que j’aurais fait.
Je pousse donc mon chariot jusqu’au comptoir de l’hôtesse...qui n’a rien reçu !

Réfléchir.

Réfléchir.

Je suis sur le parking de ce supermarché, poussant un chariot chargé, lourd comme un âne mort : pas moyen de rentrer à pied.

J’ai sur le trousseau égaré la seule clé de ma voiture qui est restée à la maison, donc pas moyen de me faire transporter dans MA voiture.

D’autre part, les propriétaires de la Toyota sont partis pour une quinzaine de jours : ça me laisse donc une marge de manœuvre.

Je vais retourner auprès de l’hôtesse : à présent, quelqu’un lui a certainement déposé le trousseau...

Rien.

Toujours rien.

J’attends en sirotant un café.

Cinq minutes.

Dix minutes.

Un quart d’heure.....

Rien !

Je retourne à la voiture, la truffe au ras du sol, comme un setter irlandais suivant la piste d’un capucin......mais nul trousseau sur le bitume !

Sur le capot de la voiture, je vide complètement mon sac, je fais des piles du fouillis qu’il contient, je vide même mon portefeuille, j’étale TOUT. Une sueur aigre commence à m’inonder : MARRE !

Je vocifère, en silence d’abord, puis à voix basse. Je ne tarde pas à m’insulter et à pousser une bordée de jurons, à gorge déployée maintenant.

Rien n’y fait. Pas de trousseau, pas de retour possible. Je suis prisonnier de mon étourderie.

FAIT CHIER !

Je tourne autour de la voiture ; seule l’idée qu’elle ne m’appartient pas la préserve de l’envie de coups de pieds que je sens monter....

Je reprends cinq fois de suite le chemin qui mène du parking à l’entrée du magasin. Je confie mon chariot à l’hôtesse, qui compatit du bout des lèvres à mon malheur. Je parcours toutes les allées du magasin (jamais je n’avais remarqué comme elles sont longues, les allées !).

Je fouille les bacs de légumes, de fruits, je rôde, je flaire, je fouine, je porte des regards soupçonneux sur celles et ceux que je croise – Ça t’amuse ? Qu’est-ce que t’en as fait, de mes clefs, vermine ?! Je suis prêt à tout pour retrouver ce trousseau et rentrer !

Évidemment, RIEN !

Rien de rien !!

Je reprends mon chariot, je sors, je me dirige vers la voiture. Je me sens abattu.

Peut-être le trousseau m’a-t-il échappé alors que je venais de sortir de la voiture ? Peut-être est-il tout simplement sous la voiture, à l’abri des regards ?
Sans y croire, je m’agenouille (NAN ! Pas pour une prière !! C’est pas le genre de la maison !!!), je m’agenouille, disais-je et j’inspecte tous les recoins.... RIEN !

Je m’accroche au chariot pour me relever (en gagnant de l’âge, on perd en souplesse !), et là..............sous le chariot.............je veux dire accroché au chariot, mais pendant sous le chariot..........qu’est-ce que je vois ???????

Mon trousseau de clés, qui sera tombé du sac, qui aura dégringolé dans le fond du chariot ….et qui sera resté coincé. Seules quelques-une des plus petites clefs sont passées à travers le fond du chariot, les plus grosses et l’anneau les empêchant de prendre ...la clef des champs !!!