Œil de DOM
Se coucher tard nuit. Me lever matin m’atteint.

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Histoire de crampons...

mardi 8 avril 2014, par Dominique Villy

Qui c’est qui est au Décathlon du coin, au rayon foot, en train d’essayer une paire de crampons de foot ?

J’vous l’donne en mille...

C’est moi !

Si !

Et pourtant combien de fois m’avez vous entendre débiner sur ces dégénérés poilus qui courent après la baballe, qui refusent parfois de la rapporter, qui traversent le terrain, bras grand écartés et se font des bisouxxx sur la calvitie naissante quand la baballe en question a bien voulu rentrer dans une porte cochère large comme une rame de métro, qui prennent les stades pour des rings privés et se foutent sur la gueule à la moindre contrariété, qui se mettent en grève, sauf si on touche à leur salaire, et qui - ça c’est déjà vu - peuvent aller jusqu’à faire couler les larmes de leur ministre de tutelle !!

Et moi, je suis là, comme un couillon, à essayer de me déterminer pour une paire de crampons !

Et c’est sans compter les risques que je prends : pourvu qu’on ne me surprenne pas !

Pour passer pour un con, y aurait pas mieux ! J’vous entend déjà :
" - Oh ! Lui ! Je l’ai vu en train d’essayer des chaussures de foot !"

Mais on ne m’y prendra pas ! Goupil, que je serai, sur ce coup-là !

J’ai choisi l’heure creuse, l’heure calme, l’heure où l’individu que je peux connaître est censé justifier son salaire en travaillant.

J’ai observé, depuis l’entrée du magasin, narine frémissante
et moustache en alerte, cherchant à débusquer toute présence embarrassante, j’ai attendu, guetté, épié, jusqu’à être sur que le champs était libre... J’ai franchi le portillon, en toute innocence, j’ai commencé à musarder... j’ai procédé à de multiples détours, emprunté des voies détournées, respecté des arrêts devant divers rayons, essayé une veste, soupesé un GPS, enfilé un masque de plongée, bref, j’ai vérifié plutôt deux fois qu’une que je n’étais ni suivi ni précédé par quelque connaissance... puis je me suis faufilé, en tapinois, jusqu’au point stratégique : le rayon foot !

Et là, j’ai rapidement opéré un choix, selon MES critères :

- le prix ( Ben, faut quand même pas exagérer !)

- la taille des crampons (faut du costaud)

- la couleur...( quoi que... Ridicule pour ridicule...)

Ensuite, il a fallu essayer !

Et là, je ne vous dis que ça : essayer des chaussures neuves, quand on veut être le plus rapide possible, et qu’on a une côte cassée , c’est pas une partie de plaisir !

Quoi ? Je vous ai pas raconté ? Pour la côte cassée  ?

Ben voilà : en poussant la tondeuse dans un talus très pentu, j’ai dérapé et je suis lourdement tombé à plat ventre sur une bosse du terrain.

Zzzziiiip ! ont fait mes lourdes chaussures...

Teufteuf teufteuf tchouk ! a fait la tondeuse...

Clac ! a fait la côte...

RôôôgnTdjuuuuuuu ! ai-je hurlé à pleins poumons (contusionnés), en me relevant vite fait, pour éviter de me faire trancher le lard par la tondeuse qui reculait...

Vingt Dieux ! Comme ça fait mal ! Vingt Dieux ! Comme c’est vexant ! Il y a tout juste un an, dans le même talus, avec la même tondeuse, je me suis étalé de la même façon, au même endroit, au centimètre près, et la même côte à émis le même "Clac" !

Alors, si je suis aujourd’hui en train d’essayer une paire de crampons de foot, c’est pas que j’ai viré ma cuti : c’est seulement que je veux faire mentir l’adage : "Jamais deux sans trois".

Moi, me mettre au foot ? Ça va pas, non ?!