Œil de DOM
Se coucher tard nuit. Me lever matin m’atteint.

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Jeudi 5 novembre 2020.

vendredi 13 novembre 2020, par Dominique Villy

Confinement ou pas, je pars !! Et pas qu’une heure !!
Enfiler un cuissard, un tee shirt en tissu déperlant, prendre également une laine polaire légère et un bidon d’eau fraîche.
Dans le placard à chaussures, choisir les plus légères. Tant pis si elles ne sont pas imperméables. S’assurer de la rigidité toujours effective des semelles. Ça compte, à vélo. Efficacité, rendement.
Descendre les quatre étages, en douce. Inutile qu’un voisin malveillant me repère dans cette tenue.
À l’autre bout de la rue, l’atelier/bric à brac/garage.
Étouffer un soupir en contournant la nouvelle compagne Honda dévoreuse de bitume, de bols d’air, de km. Elle sommeille sous un drap rouge. Demain je la ferai tourner, juste pour le plaisir de me charger de ses ronronnements.
Choisir celui des deux vélos équipé de pneus slicks.
L’avancer en pleine lumière, au plus près de la rue, sous la porte grande ouverte.
Serrer deux clavettes, régler la hauteur de la selle, enfourcher le fidèle Tornado...(Et alors ? Ça te défrise si j’ai appelé mon vélo "Tornado" ?)
Démarrage en côte.
Redoutable, surtout à froid.
Debout sur les manivelles, je pousse comme un bourrin. Vaincre l’inertie. Monter, descendre alternativement les papattes, lancer le mouvement. Prendre de l’assurance en même temps que de la hauteur. Pédaler. Transformer un mouvement alternatif en translation. Sans moteur. Uniquement avec les cuissots. Magie de la bicyclette.
Trouver le bon rythme. Ne pas griller toutes les cartouches dans les 500 premiers mètres.
Petit à petit, le plaisir s’installe, largement hydraté par la sueur. Je bois une première lampée d’eau fraîche au goulot de mon bidon chromé. Plaisir simple. Je claque de la langue.
J’augmente un chouïa mon rythme de pédalage.
Ça coule bien, sans heurts, sans à coups. Premier km, second km. Troisième km. Le terrain est légèrement incliné, en pente montante, le vent contraire nul. Autant dire que pour une reprise, les conditions sont excellentes.
Je pédale dans le silence, juste égayé par le schuintement de la chaîne bien huilée sur les pignons. Grâce au Plan "Remise en état d’une bicyclette", après le premier confinement du printemps, j’ai fait changer chaîne et cassette. Bonne idée. Qu’est-ce que nos Énarques du gouvernement vont nous inventer, après ce second confinement ?
Au guidon, mon chrono tourne gentiment. Oh ! Je ne cherche pas à battre des records : je n’en ai ni l’âge, ni le physique.
Je me dis seulement que si je roule deux heures durant à cette allure, je ne serai pas ridicule.
C’est dans ces moments-là que je les envie, les camarades cyclistes, taillés à la serpe dans un fagot de haricots verts. Moi, j’ai du bide à faire avancer. D’accord, en descente c’est peut-être un avantage...(Pas sûr)... Mais aujourd’hui, ça moooonnnnnnnte !
Cinquante huit minutes, me dit le chrono.
Holaaaa ! Pas de folies. C’est une reprise !!!
Je pose pied-à-terre, je bois un bon coup, ce qui me déclenche des ruisseaux de sueur, partout, et je repars.
S’agirait pas d’attraper un coup de froid.
Vous avez peut-être remarqué comme moi : le chemin du retour semble toujours plus court que l’aller !
La mécanique est chaude.
Les muscles répondent mieux.
L’œil à enregistré les détails du paysage.
L’écurie est proche, la douche aussi, le seau de picotin attend.
Elle est pas belle, la vie ?
Quoi ?
Comment ça, c’est interdit ?
Vous voulez rire ?
Deux heures, dans mon garage, à pédaler sur le home traîner, pour le plus grand plaisir des promeneurs qui me regardent faire, en passant...
Certes, je ne leur avais jamais fait !
Mais c’est pas interdit. Je n’ai pas bougé de chez moi !